Wonder Woman : L’égérie chez le psy

Pour la petite histoire

William Moulton Marston ce nom ne vous dit rien ? Charles Moulton ? Et oui… il s’agit bien du père biologique de Wonder Woman. En 1940 ce psychologue travaille comme conseiller éditorial pour la société All-American Publications. En 1943 il dira « Même les filles ne voudront pas être des filles tant que nos archétypes féminins manqueront de force, de vigueur et de puissance. Comme elles ne veulent pas être des filles, elles ne veulent pas être tendres, soumises, pacifiques comme le sont les femmes bonnes. Les grandes qualités des femmes ont été méprisées à cause de leur faiblesse. ».

De manière un peu plus pragmatique, à  cette époque, beaucoup d’associations de parents et d’enseignants pensaient que les comics étaient dangereux pour les enfants et qu’il fallait en interdire la parution. Les éditeurs tremblant devant la menace de la censure firent donc appel à de nombreux spécialistes dont des psychologues pour valider leurs publications. Ainsi naquit  sous les coups de crayons de Peters, la belle et forte, Diane Prince, à une époque où les femmes sortaient des cuisines pour aller dans les usines pour y remplacer les hommes partis au combat.

L’amazone est donc née avec cette fonction, dans une Amérique engagée dans une guerre mondiale qui se joue à l’autre bout du monde, d’être l’alter ego des hommes mais aussi l’archétype de ce que la femme moderne tendait à être. Première icône féminine et féministe des supers héros, elle avait donc tout pour ne pas être prise pour une comique dans ce monde de mecs.

 

Et si on couchait Wonder Woman sur le divan ?

En tant que psy, il y a toute une liste de personnes que l’on aimerait voir allonger sur nos divans (Alexandre Astier si tu nous lis… ) et dont nous aimerions faire l’analyse. La Pop culture amène cela avec elle. Et s’il y avait bien une psychologie que j’aurais aimé étudier c’est celle-là…

Psy : Bonjour Wonder Woman, aujourd’hui vous avez presque 80 ans, et vous nous revenez plus en forme que jamais ? Il était temps de nous livrer vos secrets ? Un père psy, une mère absente, l’étendard d’un féminisme latent, des extensions phalliques à n’en plus finir…Vous avez dû réveiller pas mal d’angoisses de castration ? Ne croyez-vous pas qu’il est temps de vous allonger sur le divan et de faire un point sur votre vie ?

WW : Je ne sais pas, je n’ai jamais souffert d’avoir un père psy, je ne crois pas qu’on puisse en souffrir d’ailleurs, mais il avait des attentes c’est certain. Il me voyait comme « une alternative à la violence masculine ». Je reprends ses mots là, je n’invente rien…Il m’a filé tout un tas d’attributs et de supers pouvoirs pour cela… Dont un lasso magique, oui je sais ce que vous allez dire, bel exemple d’extension phallique parce que pour se battre parmi les bonhommes c’est bien de pouvoir se battre avec les mêmes attributs. Personnellement je trouvais ça ridicule, mais bon ce lasso était un peu spécial il me permettait de faire dire la vérité aux captifs… Pensez-vous que les hommes peuvent se vanter du même résultat avec leur pénis sur les femmes ? Au nombre de fois où j’ai dû simuler mon plaisir, je crois que non (elle rit…)…

Mais c’est intéressant de pouvoir extirper toutes les vérités en possédant l’autre, sans nul doute que cela a du sonner comme une  revanche pour bien des femmes en pleine période de recherche d’émancipation. Je pense que mon père voulait que je sois une femme libre, capable de me suffire à moi-même mais capable en plus de venir en aide aux opprimés. Certains diront que ce super pouvoir de vérité correspondait à une symbolique métamorphose de l’utilisation qui était faite aux Etats-Unis de ce qui apparaissait comme une véritable avancée technologique sur l’humain, le détecteur de mensonge. En période de guerre mondiale et dans mon rôle de justicière, née pour rétablir l’ordre, cela avait du sens.

Psy :   Et comment l’avez-vous vécu vous d’avoir cette fonction de « sauveuse du Monde » ?

WW : Je ne sais pas, elle m’est tombée dessus. J’étais dans le numéro 8 de All-Star Comics. C’est dans cet épisode que Steve Trevor s’est crashé sur Paradise Island. Je l’ai soigné puis emmené loin de là. C’est là que je suis devenue Diane Prince et que j’ai commencé à travailler pour lui mais surtout pour la démocratie. De toute façon je n’ai jamais supporté l’injustice. J’ai des origines amazones, ma mère Hippolyte était leur reine mais en réalité je suis fragile, faite d’argile. On disait que c’était les Dieux qui m’avaient donné la vie, je sais qui on appelle comme ça aujourd’hui, parce que ce sont mes deux parents Moulton et Peters. J’ai très vite compris après que les pouvoirs devaient me servir à combattre le crime, alors j’ai combattu.

Distinguée de mes exploits j’ai rejoint fin des années 40 la Justice Society of America, la première équipe de super-héros, mais, les mecs ne me voyaient que comme une secrétaire un peu idiote, alors je suis partie. Cela a été un peu dur, mon ego a pris un coup. Puis c’était pas simple au début de me retrouver sans eux, mais très vite j’en ai fait une force et mes capacités et pouvoirs se sont, comment pourrais-je dire, développés. »

Psy : Qu’entendez-vous par là ?

WW : J’arrêtais les balles. J’ai pu communiquer avec mes amis grâce à mes poignets, ma tiare se transformait en boomerang et du jour au lendemain je n’ai plus eu besoin d’oxygène, je pouvais partir dans l’espace et prendre l’air tranquillement. C’est un peu déroutant mais on s’y fait vite. Non le plus dur c’est le jour où j’ai dû enquêter sans tous ces pouvoirs là on se rend compte de l’importance de ce que l’on perd.

Psy : hum hum… hum…hum

Jennyfer, la sociologue de Psycheclic : « Oh tu rêves !  Tu nous l’écris ton analyse de Wonder Woman ? »

Mince je rêvais, et mon divan est en effet définitivement vide. Ce n’est pas la première fois que je rêvais de la Miss aux formes généreuses, petite, les yeux rivés sur ma télé, ou dans la cour de récré en m’étourdissant en l’imitant, je rêvais déjà d’être une Wonder Woman. Tu veux faire quoi plus tard Séverine dans la vie ? « Save the World, What Else ? »…

 

Une Egérie de la pop culture aux origines mytho… logiques

Egerie de la Pop Culture, elle symbolise après les années 60 tout ce que nos mères et grands-mères pour les plus jeunes auront gagné de leur combat, non seulement d’être au top dans ses fonctions, pour ceux qu’elle aime, il lui fallait rester sexy et faire régner l’ordre. Bien joué Wonder Woman  vous qui êtes au top en permanence, avez-vous la moindre idée de la charge mentale que cela constitue d’essayer d’être à votre niveau ? Mais reprenons les choses à la base, car vous êtes une super-héroïne, une super-femme, qui a évolué au fil des ans à l’image de la représentation des femmes dans la société.

Avant d’aller plus loin et parler de ce qui est devenu dans nos sociétés le « syndrôme Wonder Woman », je voudrais revenir sur les origines de la combattante. Si on oublie le père psy et tous les contenus névrotiques que cela a pu générer et que l’on s’intéresse au personnage, nous verrons que l’Amazone fort entraînée a une capacité de concentration hors norme, que l’on a pu identifier loin, bien loin de sa conception, comme un cadeau émanant des Dieux. Une forme de douance venue du ciel qui se retrouve dans son hypercaptation de l’environnement mais aussi dans sa capacité de focus et d’utiliser son mental pour mener des actions. Cela renvoie à une idée de toute puissance.

Le lasso magique, extension singulièrement phallique, a été conçu dans la ceinture de la douce déesse de l’amour Aphrodite. C’est donc par ce qui centre la figure emblématique de l’amour et par le lien que le lasso incassable obtient toutes les vérités et obéissances.  C’est donc de l’Olympe et des Dieux que la jeune Princesse Diane tire ses pouvoirs. Comment alors ne pas faire de rapprochement avec son nom, donné par les amazones en hommage à une pilote américaine retrouvée morte après un crash aérien et qui ne sera autre que la mère de Steve Trevor, dont on le devine la jeune Diane va très vite s’éprendre. Œdipe quand tu nous tiens…. Mais non, nous ne dirons rien sur ce fait, pas plus que la tenue sexy très près du corps de notre héroïne aurait été conçue dans le costume de pilote de Mme Trevor mère.

Mais plus sérieusement Diane dans la mythologie romaine c’est aussi la déesse latine de la chasse. Diane est donc une grande chasseuse, elle a un rôle nourricier et protecteur puis qu’avant cela dans la mythologie latine elle était la déesse de la procréation et la naissance des enfants…. La mère de tous en quelque sorte, protectrice, nourricière, enveloppante et sublimée par la férocité qui peut être la sienne quand on touche à ses petits. Et nous voyons là au combien nous nous rapprochons de la symbolique du personnage et de la définition de la mère suffisamment bonne telle que décrite par la psychanalyse.

En psychanalyse, nous rapprochons le sentiment de toute puissance  à la croyance d’un pouvoir illimité, absolu sur le Monde, Winnicott rapprochait ce sentiment à l’obtention du stade de développement phallique. Ce moment correspond à la découverte chez le petit garçon que le sexe peut être porteur de jouissance ne serait-ce qu’en ayant la capacité d’uriner sur tous les coins de murs et pour la petite fille a une période où elle s’assure que l’organe va finir par pousser et qu’elle sera elle aussi dans se positionnement là. De là naissent nos angoisses de castration avec cette peur de perdre ce que présent ou ce que nous cherchons à combler dans l’attente que cela ne vienne.

Pour Freud la toute-puissance trouve son origine dans l’animisme (Totem et Tabou). L’animisme c’est penser que chacun d’entre nous est pourvu d’une âme et peut se jouir de ce qui l’entoure, de tout objet, de tout esprit. De là naîtrait notre envie d’en vouloir plus et toujours plus, jusqu’à tout détenir. Les attributs hypersexués, phalliques et féminins à la fois de Wonder Woman renvoient à ce sentiment. Comment ne pas imaginer alors que cette femme moderne, complète, n’aurait pas pu glisser dans une forme de mégalomanie sans son altruisme résistant à toute épreuve ?

Le syndrôme Wonder Woman

Aujourd’hui, la journée des femmes est devenue marathonienne, au « boulot, métro, dodo » nous rajoutons « ménage, occupations aux devoirs des enfants, activités de loisirs, taxi maman, et tu lanceras une lessive avant d’aller te coucher ».. Dieu merci les temps changent et beaucoup d’hommes mettent aujourd’hui la main à la pâte. Merci Messieurs, mais ce serait tellement mieux encore si vous ne preniez pas un air victorieux à chaque fois que l’on vous croise un aspirateur à la main.

Mais avouons-nous le, Mesdames, nous mettons un point d’honneur à continuer à investir nos rôles, en plus de l’autorité parentale partagée que nous avons hérité de la révolution sexuelle.

Allons, on la connait tous cette femme qui gère tout, réussit tout, elle est plus que Super, elle est Wonder ! Elle s’en plaint mais elle y prend tant de plaisir qu’elle ne peut se résoudre à être moins de 200 % en tout temps.  Limite ce plaisir devient pour elle addictif. Elle en tire une jouissance. C’est ce qui la fait exister, ce qui lui procure aussi la reconnaissance de la part des autres. Elle existe dans le groupe parce qu’elle gère, comment, elle qui manque de confiance en elle dès qu’elle n’est pas au top du perfectionnisme dans un champs, pourrait -il en être autrement ? Impossible de renoncer à cet état d’être et de confort psychique !

On a beau lui lancer des « mais prends des vacances tu vas craquer », non son truc à elle s’est de continuer, pire c’est quand elle se met en vacances qu’elle risque de décompenser. Car dans sa structure névrotique elle a besoin de maîtriser, gérer, contrôler et quand des aspects plus hystériques la rattrapent elle a besoin de donner à voir combien cela lui coûte… Mais cela n’est que transitoire, car se plaindre, ce n’est tout de même pas très Wonder Woman… Et cela tiendra à grand coup d’accroissement de charge mentale….

Psy : Alors Wonder Woman, symbole de la femme fatale, guerrière, symbole de la mère toute puissante, égérie du féminisme naissant êtes-vous fière de vos enfants ? De ce que nous portons tous de ton passage dans notre pop culture ? Et de continuer à étourdir les petites filles qui rêvent d’absolu dans les cours de récré et qui continueront à grandir en tournant sur elles-mêmes et en s’enivrant de rêves futurs d’être une prochaine vous ? En ce qui me concerne une nouvelle Lynda Carter … 

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2 commentaires sur “Wonder Woman : L’égérie chez le psy”

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