Avec l’avancée en âge, un phénomène de vieillissement normal de la mémoire s’observe. Ainsi, certains séniors peuvent par exemple, à partir d’un certain âge, peiner à retrouver une information ou un mot pourtant déjà connu. Cependant, il existe également un vieillissement dit pathologique de la mémoire, dans le cas de certaines démences de type maladie d’Alzheimer et apparentées. Dans ce cas, les troubles mnésiques sont plus massifs, et sont parfois accompagnés de troubles du comportement.
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Une solution pour freiner le déclin cognitif
A ce jour, il est impossible d’annuler la perte cognitive, mais il est néanmoins possible de la freiner. Les solutions sont connues, en plus d’une bonne hygiène de vie, ce sont des exercices variés de la mémoire. Lecture, discussions, scrabble, mots croisés, sudoku etc. pour la vie de tous les jours sont des outils précieux. En Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD), sont souvent proposés des “ateliers mémoire”. Dans ces ateliers, feuilles et crayons sont mis à rude épreuve pour faire travailler les neurones des résidents, il est également possible de s’en passer en utilisant différentes modalités (auditives, kinesthésique etc.) Mais ces exercices sont-ils possibles via le numérique ? A la base plutôt sceptique quant au réel bénéfice cognitif de jeux dits de mémoire, j’ai eu l’occasion de tester l’application Stim’Art Edith de Dysneo, en condition réelle. Petit retour d’expérience.
Je découvre donc l’application qui, nous dit-on, a pour but de « stimuler les personnes atteintes de troubles cognitifs. » Première bonne surprise, Stim’Art propose d’entrer de jeu 28 exercices tous très différents, avec 3 niveaux de difficulté, pour s’adapter à la pathologie du résident. L’accompagnant choisit les exercices qu’il estime adaptés au résident. Certains jeux sont directement inspirés de tests réels, comme le Trail Making Test, où l’on doit suivre une suite de chiffres (éventuellement alternés avec des lettres dans la version B). Le fait d’utiliser en version numérique des exercices couramment utilisés me rappelle l’utilisation du test de Stroop dans l’Entraînement cérébral du Docteur Kawashima dont nous avions déjà parlé dans un article précédent. La différence étant qu’à domicile, aucun professionnel ne pouvait exploiter ce test à sa juste valeur, contrairement à une passation en cabinet ou en institution.
L’application comprend par ailleurs de nombreux exercices qui pourraient tout à fait être utilisés en atelier mémoire. Certains entraînent la mémoire de travail (mémoriser des suites de couleurs, des ingrédients de recettes…), d’autres le champ lexical (reconstituer des phrases, proverbes), ou encore la mémoire sémantique (le stock de connaissances générales) avec des exercices de culture générale.
Un outil de remédiation plus qu’un jeu vidéo mémoire
Concrètement donc, l’outil est vraiment pensé pour être un véritable support de remédiation cognitive et non un simple jeu vidéo de mémoire. L’éditeur recense quelques études dont ils se sont inspirés pour l’élaboration de leur outil. Par ailleurs,une étude nommée « Adoption and Use of a Mobile Health Application in Older Adults for Cognitive Stimulation » valide la progression dans les jeux de cette application et du bien-être en général. Une seule étude basée sur un échantillon de quinze personnes ne saurait être représentative pour le moment, on attend d’autres recherches pour en savoir plus.
Le test du Psy
Je décide donc de tester le matériel auprès de quelques résidents pour me faire ma propre idée. Premier essai avec une dame plus jeune que la majorité des résidents de l’établissement, qui ne présente que très peu de troubles cognitifs. Vous trouvez peut-être étonnant que je sache situer précisément les résidents de l’établissement sur le plan cognitif. Cela est possible car tout simplement objectivé par plusieurs tests cognitifs dont le plus connu est le Mini-Mental State Examination (MMSE). L’échelle mesure différentes dimensions cognitives, sur un score total de 30. Au-dessus de 26-27, pas de troubles cognitifs, entre 20 et 26, on peut penser que des troubles légers sont potentiellement présents, entre 10 et 19, on parle de troubles modérés, en dessous de 10, sévères. A noter que les scores sont ici donnés de façon approximative, certains paramètres tels que l’âge et le niveau d’étude peuvent être pris en compte.
Revenons à notre résidente. Peu habituée aux nouvelles technologies, les premiers clics du bout des doigts manquent de précision. L’ergonomie de l’application lui permettra cependant de s’améliorer en quelques minutes, et de réussir avec brio les premières épreuves. Comme j’aime à le dire fréquemment l’outil numérique ne prend tout son sens que lorsqu’il fait médiation entre les personnes. Alors que les premiers exercices ne présentaient aucune difficulté pour moi, lors du jeu de culture générale, nous avons réellement joué ensemble. Et pour la pathologie de cette résidente que je ne peux naturellement pas détailler ici, l’échange avec l’Autre ,était le but recherché, bien plus que les performances cognitives.
L’application tournant sous Android, elle peut donc être diffusée sur la télévision de la salle commune pour des exercices. J’imagine que la résidente en question trouvera sa place dans le groupe lors de ces jeux, de la même façon qu’elle est au cœur du groupe lorsque nous jouons à la Wii, elle qui a pourtant tant de mal à y être le reste du temps.
Je choisi de tester l’application auprès d’un résident présentant des troubles cognitifs dits modérés. Il comprend immédiatement les consignes, son attention semble captée par les jeux que je lui propose. Il parvient à dénombrer des ballons de couleurs et à effectuer assez justement des calculs mentaux, preuve que sa mémoire de travail et ses fonctions exécutives ne sont que peu atteintes. En revanche, l’exercice d’intrus lui donne plus de mal. C’est donc en s’entraînant à ce type d’exercice et d’autres en version papier traditionnel qu’il pourra exercer cette composante cognitive un peu plus déficitaire, afin qu’elle ne se détériore pas d’avantage.
Je n’ai pas encore eu l’occasion de tester Stim’Art sur des personnes présentant des troubles plus évolués, je présume que les bienfaits seront moindres mais probablement pas nul, et permettront qui plus est de favoriser la relation avec le soignant, ce qui est un objectif primordial pour ce type de patient.
Le verdict
Plutôt méfiant de prime abord, je suis donc agréablement surpris de cet outil. Complet, très simple d’utilisation même pour les soignants réfractaires aux nouvelles technologies, c’est un bon complément aux “ateliers mémoire”, très pratique pour le travail en individuel, notamment pour les personnes présentant des problèmes praxiques (où l’écriture serait plus difficile). De la même façon, il peut servir de support pour les jeux mnésiques collectifs, menés par les soignants et/ ou les animateurs.
A noter enfin que, contrairement à certains outils, le tarif est tout à fait correct pour une entreprise.