Quand nous parlons jeux vidéo aujourd’hui, nous avons tous en tête les licences les plus connues comme Super Mario, FIFA, Call Of Duty qui sont toutes les trois dans le top 5 des jeux les plus vendus en France. Des licences internationales dont la place interroge sur celle de leurs homologues françaises. Je me suis donc intéressée aux jeux français pour savoir où en est la France dans ce secteur qui a brassé en 2018, 4.9 milliards d’euros.
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Le jeu vidéo Made in France
Les jeux vidéo français à succès ont envahi le marché. Que ce soit Assassin’s Creed d’Ubisoft, la licence Dofus qui a accompagné mon adolescence, d’Ankama, l’excellent Detroit Become Human de Quantic Dream qui a gagné le prix du meilleur jeu vidéo de l’année aux Ping awards 2018, l’excellent jeu narratif Life is Strange de Dontnod ou encore Prey et Wolfenstein : youngblood d’Arkane Studio. Tous ces jeux ont de commun d’être nés sous la bannière tricolore !
Mais les jeux vidéo français ne sont pas tous issus de ces grands développeurs ayant de gros budgets production et communication. Parmi les “petits” Out There, Furi ou encore Dead Cells pour les plus récents ont su se démarquer et se faire une place sur la scène vidéo-ludique avec de plus humbles moyens mais de toutes aussi belles ambitions.
Des moyens de production et de communication
Le jeu vidéo, depuis sa création est produit à plusieurs échelles avec des jeux développés par la grande industrie mais aussi par des sociétés plus petites qui créent “dans leur garage”. La différence de production d’un jeu vidéo n’est donc pas une question de savoir-faire, mais plus de moyens. Enfin, même si le jeu vidéo nécessite d’avoir accès à une multitude de corps de métiers que sont les développeurs, les game designers, les sound designer, les illustrateurs, les modélisateurs, les animateurs … Créer un jeu vidéo, c’est avant tout du temps, des compétences, de l’expérience mais surtout de la détermination.
La différence entre la série à succès The Legend of Zelda, dont un opus est sorti en 2013, et Evoland, petit jeu indépendant la même année et issu d’un Ludum Dare, qui est un hommage assumé à la licence n’est donc pas dans la réalisation du jeu qui se veut de la même veine mais dans la mise en avant du jeu et les moyens économiques alloués.
Finalement, la différence entre deux jeux vidéo de même type est le budget attribué lui permettant de trouver son public. La clé du succès d’un jeu vidéo serait donc un savant mélange entre compétence, créativité, expérience dans le domaine, et, les moyens alloués à la mise en avant de son jeu.
Les liens entre développeurs, éditeurs et distributeurs
Comme dans tout secteur de vente, un produit dont personne n’a eu vent n’a que très peu de chances de s’écouler, et c’est cette question de la mise en avant du produit qui nous permet de nous questionner quant au système économique lié au marketing et à la communication autour de ce dernier.
Comme dit plus haut, pour vendre un jeu, il ne suffit pas de le créer. Il sera toujours question d’établir au préalable une stratégie commerciale, dans l’optique de faire connaître celui-ci avant sa sortie.
Les stratégies commerciales dans le secteur du jeu vidéo sont nombreuses et parfois très imaginatives. Même s’il est aujourd’hui assez commun d’entendre parler de jeux émergeant d’un plan de financement participatif, certains studios n’hésitent pas à casser les codes, et à concentrer leur communication exclusivement sur les réseaux sociaux.
Comme exemple de jeu vidéo en financement participatif, nous pouvons parler de nos champions français que sont les Noob dont le RPG (jeu de rôle), en développement, issu de l’univers de la websérie, a été financé entièrement par les contributeurs.
Pour leur premier jeu, ARK : Survival Evolved, l’équipe du Studio Wildcard a choisi de baser l’essentiel de sa communication avant sa sortie sur le réseau social anglophone Reddit. Stratégie singulière et payante à en juger par le succès commercial de ce jeu.
La méthode la plus courante reste cependant de passer par les salons de jeux vidéo, de faire connaître son jeu par le biais des influenceurs et autres médias spécialisés pour le mettre en avant.
Dans le but de les aider à promulguer leur jeu pour les jeunes développeurs des structures ont été créées afin de mettre en lien les indépendants avec les éditeurs, les investisseurs, et leur public potentiel. Ces structures sont en général un pont leur permettant un accès aux salons de jeux vidéo ainsi qu’à une communication autour du produit.
Nous avons rencontré l’une de ces structures durant la Paris Games Week.
L’exemple de capital games : le Made in France à la PGW
Capital Games est une association régionale qui depuis presque 15 ans conseille et oriente les entreprises grâce à leurs réseaux et à leurs partenaires institutionnels, pourvoyant des aides, sur les questions de financement, export, marketing.
L’association est présente sur trois gros événements en île de France (la Game Connection, les IndieCade Europe et les jeux Made In France à la PGW) où ils présentent et mettent en avant des créateurs indépendants.
L’espace Made in France est un grand espace où sont rassemblés les acteurs du jeu vidéo indépendant français, celui-ci prenant place dans le plus grand salon spécialisé de France, la Paris Games Week.
Les jeux vidéos indépendants désignent des jeux vidéo créés, bon gré mal gré, sans l’aide financière d’un éditeur de jeux vidéo. Être un développeur indépendant peut être un choix ou simplement un recours en attendant de trouver un éditeur ou un distributeur.
J’ai pu rencontrer le chargé de projet de Jeux Made in France , qui m’a aidé pour comprendre en quoi le Made in France permet de mettre en avant une production française du jeu vidéo en rendant accessible de grands salons.
Le Stand Made In France de la PgW : une trentaine de créations à tester
Sur le stand Made in France, on peut trouver deux types de présentations de jeux. D’un côté les stands de jeux de Focus ou encore de Atypique Studio, et de l’autre plein de bornes avec une foule de jeux comme Papaye Bang Bang, Radial, Kingdom of Rhéa, As Far As the Eye, Blockchain Battle, Homo Machina ou encore Curse of the Dead Gods…
D’un côté il y a donc une formule “petits” indépendants, un modeste stand, génériquement customisé à l’image du jeu présenté, deux ordinateurs, ainsi qu’une aide à la gestion avec la présence de bénévoles. De l’autre, des stands sur-mesure à la demande des indépendants.
La seule différence entre les deux types de prestations ne serait qu’une question de taille de stand et donc de moyens. Mais la taille c’est important, plus le stand sera visuellement visible et plus il laissera son nom comme empreinte.
Notons que dans les deux types de stand, la communication est organisée par le Made in France avec un travail de mise en avant de tous les jeux de manière homogène.
Les développeurs avec qui j’ai pu discuter ont tous eu un discours très similaire de mise en avant de leurs produits par cette présence à la PGW. Entre promotion et test de leurs produits et rencontre avec le public de la PGW, les indépendants existent à côté des stands énormes de Playstation et de 2K games.
Le succès de l’industrie française
En somme, aujourd’hui, nous pouvons parler d’un succès de l’industrie française dans le secteur du jeu vidéo avec des licences très populaires vendues à l’internationale comme les productions des géants que sont Ubisoft, Focus Home Interactive, Ankama, Quantic Dream, DontNod ou encore Arkane.
Mais, si les gros éditeurs vendent avec succès leurs licences, les indépendants français arrivent encore à nous surprendre avec des productions qui trouvent leur public et deviennent des jeux incontournables tels que Trackmania ou encore Dead Cells.
De la création d’un jeu à la vente du produit fini, le fonctionnement de l’industrie du jeu vidéo est classique. Un produit dont personne n’a entendu parler se vend forcément moins bien qu’un jeu mis en avant. Ce travail de mise en avant nécessite des moyens et des connaissances en marketing et communication. Il existe plusieurs manières d’y parvenir. Des structures sont ainsi nées pour répondre à ce besoin, et Capital Games est l’une d’entre elles. Cette organisation veut conseiller et orienter les entreprises, notamment en mettant en avant leurs produits lors d’événements. Le travail des structures est de faire en sorte qu’il y ait de la place pour les grands, comme pour les petits développeurs de jeux vidéo.
Capital Games avec son stand Made in France à la PGW a réussi cet exercice de faire coexister jeux indépendants et Triple A. Le principe même du stand permettait par la présence des plus gros indépendants de financer la présence des plus petits et autorisait à la philosophie de Capital Games d’être.
Bibliographie
Coavoux, Samuel. « Les jeux vidéo, un bien culturel ? », Médiamorphoses, n° 22, février 2008 », Lectures [En ligne], Les comptes rendus, 2008, mis en ligne le 30 décembre 2008, consulté le 22 novembre 2019. URL : http://journals.openedition.org/lectures/5144
Lagarrigue, Cédric. « L’éditeur de jeux vidéo qui dynamise la création française », Le journal de l’école de Paris du management, vol. 133, no. 5, 2018, pp. 23-29.
Michaud, Laurent. « Le marché mondial des jeux vidéo : vers une nouvelle phase de croissance », Géoéconomie, vol. 63, no. 4, 2012, pp. 7-23.