Le 13 décembre dernier avait lieu le Colloque National du Jeu Vidéo à la Cité des sciences. Neuf heures, de conférences, tables rondes, débats passionnants grâce à une pléthore d’intervenants de qualité venus nous expliquer ce qu’était le jeu vidéo hier, ce qu’il est et tend à devenir, mais aussi pour nous aider à nous repérer dans la multitude de métiers que le domaine a ouvert au cours de ces quarante dernières années.
L’occasion pour nous de faire un point sur le sujet, car ne nous mentons pas le jeu vidéo est un domaine qui alimente tous les fantasmes, et parmi celui-ci le fait que bosser dans le jeu vidéo c’est être un Game Designer reconnu. Le passage de l’artisanat des années 80 à l’industrialisation d’aujourd’hui a considérablement changé les paysages et ambitions… Alors en 2020, c’est quoi travailler dans le jeu vidéo ?
Au cours de cette incroyable et fascinante journée, les pionniers français, chercheurs, industriels et formateurs sont intervenus autour de trois tables rondes animées par Jean Zeid, journaliste et commissaire d’expositions et entrecoupées de projection de vidéos d’archives, qui ont énormément émues les quadragénaires comme moi et étonnées voire faire rire les plus jeunes. Nous avons pu entendre les chercheurs qui ont présenté leurs travaux universitaires sur l’évolution de la production des jeux vidéo, de l’histoire d’adolescents rêveurs que l’on qualifiait de « no life » hier à nos adultes d’aujourd’hui qui sont autant de petites mains de cette belle industrie. Nous avons pu faire un point sur les formations en Game-Design et leurs évolutions de ces dernières années avec ce constat amer que le marché étant fructueux beaucoup d’écoles naissent, promettent, mais que la réalité reste qu’en terme de Game Design il y a beaucoup d’appelés pour beaucoup d’élus, que les métiers connexes sont encore trop mal connus et pourtant tellement prometteurs de belles carrières. Et enfin une dernière parenthèse a été ouverte sur les réalités de la production. Un défilé d’illustres acteurs, passionnants, impliqués qui ont rendu ces neuf heures de conférences que vous retrouverez ici interactives et …trop courtes…
La conférence la plus touchante fut sans nul doute la dernière, et comme les fins d’histoires nous renvoient aux débuts de ces dernières, ce fut celle des plus anciens. Et nous sommes restés deux heures et demi, à écouter ceux qu’on ne présente plus mais que l’on se plait à appeler les pionniers du jeu vidéo français, nous raconter leurs biographies de leurs premiers pas à leurs projections plus actuelles. Emouvant Philippe Ulrich, qui nous parle de sa fille Dune et qui nous explique comment il revit aujourd’hui de chez lui et en toute discrétion ses premières amours avec la musique, comment il nous invite à ne pas renoncer, à ne jamais rien lâcher. Une leçon de vie qu’il nous livre auquel l’auditoire restera suspendu.
Touchant Frédérick Raynal, qui nous raconte son adolescence à convaincre son père de l’avenir du Jeu Vidéo à une période où personne n’y voyait qu’une passion passagère de quelques adolescents mal dans leurs peaux. Du fond de sa Corrèze natale, sorti comme un cri son devenu célèbre Pop-Corn. Si le jeu cassait des briques Frederick semble ne pas regretter encore aujourd’hui l’avoir offert en accès libre parce que non à l’époque c’était pour lui impensable de se faire payer « pour permettre aux autres de jouer ».
Cinéphile et en errance dans le vidéo-club familial il nous racontera comment Alone in the Dark est sorti de son esprit pour se matérialiser dans ce qui fut l’invention d’un genre nouveau.
Espiègle Marc Albinet qui racontera ses souvenirs sur Space Invaders. Hors de question pour lui de ne pas finir ce jeu qu’il avait découvert des heures durant sur une fête forraine lyonnaise. « Quoi on peut finir Space Invaders ? » s’étonne son compère de toujours. Et oui, mais pour cela il fallait une machine qui claque et ça aura été un Atari 2600. Je sais dit comme ça aujourd’hui….
Elles sont belles ces histoires, elles sont celles des découvreurs d’un nouveau Monde, d’un Monde où le jeu change de support, d’un Monde de création, d’initiative et d’onirisme. De belles âmes et de belles envies, le tout sur un fond de complicité ancienne qui transpire de noblesse. Le public séduit a les yeux qui brillent et vient l’heure d’un constat plus sombre : cette époque est révolue, le développement du jeu vidéo ne ressemble plus à cette Odyssée, belle aventure personnelle pour devenir un tout plus collectif.
Le Game Design a changé, aujourd’hui la complexité de la technologie, les spécificités graphiques, des scenarii, de la nécessaire production de masse a changé la face de ce Monde.
Marc Albinet va le résumer cet état de fait en une phrase lorsqu’il dira qu’il faut qu’un mec dans une équipe aujourd’hui pour définir le rendu de la texture d’une pierre dans un jeu triple A, alors qu’avant il fallait tout faire, tout penser, jusqu’à la musique (n’en déplaise à Philippe Ulrich qui a tout de même pu travailler avec J-M Jarre). A propos de ce triple AAA, Frédérick Raynal, lui attribuera le succès actuel du Retro-gaming parce que selon lui les amoureux du jeu vidéo en ont marre de jouer toujours avec le même flingue dans la même histoire.
Ce que nous pourrons surtout retenir de cette conférence, que vous retrouverez ici, et que nous vous convions à voir, à revoir et à partager, car elle transmet une histoire, une aventure, c’est cette transformation d’un métier unique en une subdivision d’une multitude de petites fonctions.
Et ce que nous retiendrons de cette conférence c’est la multitude de ce que ces fonctions ont vu créer comme métiers, que nous vous inviterons à découvrir tout au long de cette année dans nos lignes et à travers les rencontres que nous ferons au cour d’une saga vidéo qui sera plus que ludique !
En attendant merci la cité des sciences, le CNJV, le Sell pour cette incroyable colloque. Merci Hovig Ter Minassian, Guillaume Montagnon, Oscar Lemair, Florent Gorges, Carole Faure, Didier Chanfray, Sébastien Genvo, Douglas Alves, Christian Loize, Thierry Perreau, Marine Macq, Laurant Weill, Olivier Enselme-Trichard, Sylvain Huet, Marc Albinet, Frédérick Raynal, Philippe Ulrich et Bertrand Brocart de tout ce que vous nous avez transmis ce jour-là et ces dernières décennies.
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