Final Fantasy VII, nouvelle expérience ou madeleine de Proust ?

Enfin ! Final Fantasy VII Remake est sorti officiellement la semaine dernièreAnnoncé depuis l’E3 2015 et 23 ans après la parution de la première version du jeu, Square Enix nous propose de vivre une nouvelle expérience vidéoludique dans un monde qui a fait vibrer toute une génération de joueurs et qui a profondément marqué son genre. Mais Final Fantasy, c’est quoi ?

LA licence J-RPG

Final Fantasy, c’est un peu “l’enfant de la dernière chance de Square Enix” qui se donne aujourd’hui l’occasion d’une renaissance dans de meilleures conditions. A l’époque les rumeurs qui circulaient sur la mauvaise santé financière du développeur ont fait naître la légende urbaine d’une “dernière fantaisie” où tous pouvaient (de toute façon) lâcher tout ce qu’ils avaient… Cela a été démenti depuis par le créateur de la licence mais quel grand succès n’a pas son mythe associé…

Plus concrètement, Final Fantasy est une licence qui a su trouver son public dès sa sortie en 1987, initialement exclusive au Japon. Avec pas moins d’une quarantaine de jeux à travers le monde, Final Fantasy s’est décliné en de nombreux produits et supports : des spin-off, des films, des animes, des livres, des manga et beaucoup d’objets à l’effigie des personnages et, de ces histoires. Final Fantasy est un univers transmédiatique, mais avant tout, un succès économique indéniable. En mars 2019, la licence affichait 144 millions d’exemplaires écoulés (source : Square Enix, 2019) ce qui la classe à la 11ème place des séries de jeux vidéo les plus vendues.

Mais, qu’est ce qui a fait le succès de Final Fantasy ? Que l’on aime ou que l’on déteste, cette licence a profondément impacté la culture vidéoludique. Elle a marqué autant les joueurs (et joueuses qui se sont appropriées en masse l’univers) que son genre. Loin d’être une danseuse, elle  a ouvert le grand bal et permis la  popularisation du combat en tour par tour.

Final Fantasy, c’est aussi des thèmes musicaux marquants. Nobuo Uematsu en tant qu’auteur des bandes originales des onze premiers Final Fantasy nous a régalé. Notons que la plupart des épisodes  ont connu leurs versions orchestrales et ont donné lieu à  des concerts organisés à travers le monde. Par exemple, dès décembre 1989, l’orchestre symphonique de Tokyo a repris les musiques de Final Fantasy I et II au Gohanda Hall.

Le prochain concert très attendu en France, aura lieu à Paris le 13 décembre. Organisé par Square Enix avec à nouveau Arnie Roth comme chef d’orchestre, il s’offre le Palais des congrès comme écrin. Nommé “Orchestra World Tour” la tournée reprendra la bande originale de Final Fantasy VII Remake qui a la chance d’avoir un thème écrit par Nobuo Uematsu. Pour les arrangements et les nouvelles compositions nous saluons déjà l’excellent travail de Masashi Hamauzu et Mitsuto Suzuki. On leur doit aussi la B.O. de FFXIII. Des billets sont encore disponibles à l’heure où j’écris ces lignes mais ne le seront peut être plus à l’heure où vous les lirez. Dépéchez-vous il n’y en aura pas pour tout le Monde !

Difficile de ne pas rappeler là que les morceaux musicaux extraits d’oeuvres sont aussi, pour les fans, un moyen d’appropriation de ces dernières et l’on trouve une multitude de reprises des thèmes de la licence sur Youtube dont celle du duo Owaru qui vient de sortir un clip du thème “Fighting Theme / Those who fight” extrait de FFVII que vous aller sans nul doute adorer. 

Final Fantasy VII, de la licence à l’oeuvre

Mais, si la licence a eu du succès, FFVII a une place particulière, Final Fantasy VII, c’est plus de 9.7 millions d’exemplaires, et le second jeu le plus vendu sur PS1. Ce succès a permis au genre J-RPG (comprendre jeu de rôle japonais) de se démocratiser et de s’exporter.

FF VII a marqué les mémoires de tous, que ce soit pour ses graphismes en 3D, ou ses scènes en images de synthèse révolutionnaires, pour son scénario riche, ses musiques emblématiques ou encore pour ses personnages charismatiques. Cela n’est pas étonnant, au regard de toutes ces qualités, qu’il soit encore à ce jour l’opus le plus vendu de la licence. 

Aujourd’hui, malgré son succès mondial , FF VII redistribue les cartes mais est aussi encore très critiqué pour ses protagonistes remplis de clichés : ses personnages féminins fragiles et sensibles, son méchant iconique et un héros avec une grosse épée, symbole de toute puissance. Qu’importe ! Les puristes, eux nous diront qu’il ne trahit en rien l’esprit FF , quitte à perturber les biens pensants actuels. Quoiqu’il en soit, tous ces personnages sont devenus  plus que des références, des poncifs du jeu vidéo… Et même si l’on ne peut nier que l’oeuvre de 1997 a mal vieillie, elle reste aujourd’hui un jeu ayant une place particulière dans le cœur de ceux qui l’ont découvert à l’époque de la PS1.

Et pour les autres alors ?

Pour ceux qui n’ont pas eu le plaisir de découvrir la version originale du jeu à l’époque et qui ne connaissent FFVII qu’à travers les discours des nombreux fans de la licence, ou bien encore pour ceux qui n’ont jamais eu le temps de s’y pencher, Square Enix, par ce remake, propose une nouvelle version pour les fans, les vrais de vrais. Mais pas seulement, car c’est aussi  une nouvelle aventure à qui serait trop jeune pour la connaître. L’occasion pour ceux n’ayant jamais touchés à FFVII de s’y pencher.

Mais redéfinissions le « Remake ». Il s’agit « d’ une nouvelle version d’une œuvre existante, on reprend un univers existant et on reconstruit le scénario et le gameplay afin de proposer une nouvelle expérience vidéoludique.

Nous n’avons donc pas là affaire à une remasterisation, qui est une réédition d’un jeu existant où l’on ne touche pas au scénario ni au gameplay mais aux graphismes, aux textures … Ni à un portage qui est le fait de modifier un jeu pour le rendre compatible avec une autre console.

Aeris, la marchande de fleur qui a chamboulé le cœur de nombreux joueurs et joueuses d’hier et d’aujourd’hui

Petite déception tout de même, Final Fantasy VII remake ne comprend pas tout le jeu original. Square Enix l’avait annoncé, le remake se fera dans un format épisodique et dans un environnement plus ouvert que l’œuvre originale souvent jugée trop linéaire. Dommage, c’est raté si l’histoire est belle, l’univers enchanteresque, nous sommes bien là encore une fois devant quelque chose de très linéaire. Mais encore une fois la fidélité à l’original oblige, peut-être était-il difficile de s’y contraindre ?

La carte de Final Fantasy VII sur PS1 qui comprend tout le territoire dans lequel on évolue

Cet épisode, qui compte tout de même entre 30 et 35h de jeu, ne comprend en réalité que la partie du scénario se déroulant à Midgar (soit les 6 premières heures du jeu original). Nous devrons attendre encore pour revivre pleinement l’expérience d’il y a 23 ans. Mais être patient, ça va, Square Enix, nous a appris, et force est de constaté que cela valait le coup. 

Cloud, face à Midgar, la ville siège de l’entreprise SHINRA.

Nostalgie et industrie

Remake, remasterisation, portage Le jeu vidéo, largement démocratisé depuis les années 1980, est aujourd’hui omniprésent dans notre quotidien, que ce soit sur nos téléphones, nos consoles ou nos ordinateurs, et ça, les marketeux l’ont bien compris.

C’est pour cette raison que depuis quelques temps, nous avons le plaisir de voir réapparaître des objets de notre enfance vidéoludique. Avec le retour de Crash Bandicoot ou Spyro, mais aussi de certaines consoles rétro, telles que les NES Classic et MegaDrive Mini, l’industrie de la nostalgie serait-elle en pleine extension ?

Spyro, le dragon qui grimace sur PS1 et sur PS4 pour son remake sorti en 2018. 

Tout comme le faisait l’odeur des madeleines avec Marcel Proust, ces objets, véritables rappels mémoriels d’un temps passé, nous replongent dans notre enfance/adolescence ou permettent de découvrir une histoire du vidéoludique à travers un patrimoine nouvellement adapté. 

Si, grâce au retrogaming, dont Jean Paul vous parlait dans cet article, ou au retour de ces objets, il nous est possible de regoûter aux expériences vidéoludiques anciennes, le remake peut-il nous apporter ou nous réapporter les émotions d’antan? Bref la Madeleine de Proust est-elle encore la Madeleine de Proust ? Garde-t-elle la même saveur ?

Un univers, deux expériences ?

Final Fantasy VII, à sa sortie, en 1997, a donné une grande claque à tous les joueurs qui sont partis à l’aventure avec Cloud. Aujourd’hui désuet technologiquement, le jeu est resté un monument ! Le scénario revisité n’a jamais été autant d’actualité qu’en 2020 avec une  thématique autour de l’environnement, de la préservation des ressources de la Terre et du combat de certains qui oeuvrent pour. Evidemment, je ne prône pas l’éco-terrorisme, mais une aide à la prise de conscience tout au moins… Et là bravo FF, c’est plutôt bien joué !

Conclusion

Ce premier volet de retour dans l’univers de FFVII fait le job en nous replongeant dans l’aventure auprès de personnages qui ont marqué toute une génération de joueurs mais avec une expérience différente que permet la technologie actuelle. Le Gamepalay de prime abord jugé encore trop linéaire nous renvoie à quelque chose de délicieusement régressif qui n’aurait pu l’être autrement. “Le positionnement régressif n’est jamais un retour en arrière, mais une manière de considérer les choses autrement, souvent, avec plus de profondeur” pour citer la psy qui me sert de réac’ chef.  Pour les autres, ce remake permet avant tout de mieux comprendre l’évolution du jeu vidéo et de goûter à une expérience, que ce monument qu’est FFVII, nous apporte sans que nous ayons à subir le fossé technologique entre hier et aujourd’hui. Parce que oui, il faut le dire, relancer FFVII sur PS1  ça pique les yeux !

Suivez les conseils de Tifa et foncez faire un tour à Midgar ! 

Pour aller plus loin

  • Courcier N., El Kanafi M., La légende Final Fantasy VII – création, univers, décryptage, Third Edition, 2016.
  • Lucas R., L’Histoire du RPG – Passés, présents et futurs, Pix’Nlove, 2014.
  • Pix’n Love #33 – Final Fantasy VII
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