De plus en plus de parents de par le monde dénoncent le caractère addictif du jeu en ligne, et dans de nombreux pays le nombre de plaintes contre le développeur se multiplient. Certains accusent de rendre les joueurs accros et les professionnels de santé alarment sur les conséquences de cette nouvelle forme d’addiction qui touche les plus jeunes gamers. Dans ce fouilli médiatique de quelles informations disposons nous ?
Dans les faits le PEGI est à 12 ans. Dans la pratique l’univers très « dessin animé » et la gratuité (toute relative) du jeu ont attiré de jeunes, très jeunes joueurs, nous les avions croisés à la PgW l’an passé sur un stand monumental. Ils étaient dans les files des heures durant accompagnés de leurs parents qui trouvaient pour la plupart « l’univers sympa » et ne voyaient pas où était le mal à laisser leurs enfants de 8 voire 6 ans jouer “comme les copains” au jeu phénomène. D’ailleurs eux-mêmes y jouaient et n’y voyaient aucun inconvénient.
Normal ? Oui le jeu est fait pour cela, séduire, parents et enfants, leur permettre d’aborder un sujet de conversation commun, dans un univers enfantin, même sur un fond de ce qui reste rappelons-le une Battle Royale.
“Donc dans les faits oui Fortnite est une drogue, elle touche nos enfants, et font d’eux de futurs junkies en devenir. Et nous parents séduits par le produit n’avons tout juste pas vu que nous faisions entrer le loup dans nos bergeries.”
Aujourd’hui les mêmes parents déchantent et nous voyons apparaître dans les cabinets de psys de plus en plus de demandes en lien avec une nouvelle forme d’addiction. Deux aspects sont à souligner à ce sujet. De mon expérience de psy, c’est la première fois que nous sommes confrontés à cette réalité là.
Pour nombre d’entre nous l’addiction au jeu vidéo aujourd’hui entrée dans la sainte bible des maladies mentales rédigée par l’OMS, n’existait pas en tant que telle. Nous étions tout au plus ludo-dépendant et cela englobait le jeu au sens large et c’est donc bien la première fois que nous retrouvons tous les symptômes de l’addiction en lien avec l’utilisation d’un jeu vidéo.
Voilà de quoi nous alerter, mais pas que… Parce que le plus gros soucis reste avant tout l’âge de nos très jeunes patients. Ils sont de plus en plus jeunes à devenir accro au jeu, à un âge où la plasticité cérébrale est très importante nous pouvons imaginer avec effroi que tous ces enfants qui sont en train d’imprimer durablement les circuits de la dépendance dans leurs cerveaux seront susceptibles de devenir accros à toute autre substance plus tard. Donc dans les faits oui Fortnite est une drogue, elle touche nos enfants, et font d’eux de futurs junkies. Et nous parents séduits par le produit n’avons tout juste pas vu que nous faisions entrer le loup dans nos bergeries.
Au détour d’une petite enquête, nous nous sommes procurés le livre de Célia Hodent édité en anglais aux éditions CRC Press en 2018. Le titre :« The Gamer’s Brain », et dans son contenu, nous retrouvons bien évidemment tous les bienfaits du jeu vidéo, tels que nous les prônons et les utilisons, même parfois dans nos remédiations cognitives (répétitions d’actes visant à ré-entrainer certains circuits corticaux). Jusque-là rien de neuf sous le soleil flamboyant du vidéo-ludique. Sauf que… nous nous sommes un peu plus en avant penchés sur la description faite des émotions du joueur et si vous avez l’occasion de vous procurer ce livre nous vous invitons à vous pencher sur le chapitre 7 et plus particulièrement encore sur le 7.1 qui traite bien des circuits renforcés au niveau du système limbique qui est le circuit des émotions.
“Oui, les développeurs de jeu ont les moyens et les utilisent pour stimuler ce circuit neurobiologique de la récompense immédiate qui sous-tend tous les processus addictologiques.”
Tout est là en quelques lignes sur un livre qui compte un peu plus de 200 pages et qui a été écrit par la personne qui travaillait comme Directrice ” de l’expérience utilisateur” en 2017 chez Epic. Cela pourrait passer inaperçu mais le message est clair. Cela pourrait encore plus passer inaperçu que cette information ressemble à un grand secret bien gardé. Sauf que cette fois le secret n’est pas caché dans un tiroir non, il est bien visible, De là à penser que le jeu a été conçu pour être viral mais surtout pour fidéliser par la dépendance de jeunes, très jeunes joueurs il n’y a qu’un pas. Et nous sommes en train de le franchir.
Les autorités sont saisies et Epic Games semble faire la sourde oreille fasse aux voix qui s’élèvent…
La situation est telle que des parents portent plainte dans d’autres pays , au Canada entre autre, ces dernières se multiplient depuis quelques jours. Les autorités sont saisies et Epic Games semble faire la sourde oreille fasse aux voix qui s’élèvent…
Des solutions existent, nous travaillons avec ces enfants en thérapie, mais nous devons admettre que les tableaux cliniques sont de mauvais pronostics. Le travail thérapeutique ressemble parfois à s’y méprendre à celui qui pourrait être fait avec un “accro” aux drogues dures et les conséquences sociales de ces addictions sont dramatiques : isolement, dépression, pertes financières, petite délinquance…. A nous parents avertis de prêter attention à nos enfants, à nous encore de les éduquer et à nous professionnels de faire tomber les masques et d’élever nos voix pour que ce qui ressemblait à un jeu innocent hier ne devienne pas la souche d’un malaise sociétal plus profond demain…
(Dossier plus détaillé à venir….)