Entre numérique et Covid-19, la belle et la bête ?

Cher lecteurs,

Voici quelques pensées intimes que je vous livre….

Le numérique, c’est mal, disait récemment un certain Desmurget que nous sommes allés lire en masse, officiant au culte de la peur de la culpabilité parentale, voilà ce qu’il ressortait de ses écrits : nous allons tous finir crétins ! Soit mais j’ai envie de dire des crétins vivants….

Comme vous, je sus confinée dans mon appartement. Spacieux environnement parisien, je suis privilégiée…. 57 m2, deux chats, des livres, un piano, une petite pile de dossiers, un livre en écriture et des écrans… Des écrans qui me disent des choses qui me font peur, qui m’abrutissent aussi… Je lui accorde cela à Monsieur Desmurget Et comme beaucoup d’entre vous, j’ai réussi à les éteindre, pour me protéger, pour épargner mon hystérie. Puis j’ai allumé d’autres écrans comme autant de petites lumières. Je restreins mes accès aux actualités et vis mon confinement comme beaucoup sur Netflix, Facebook, des tutos de piano, quelques lectures orientées…. Je joue, me divertis, passe le temps et m’informe à ma guise et j’ai presque envie de dire à ma santé, mais pas seulement… Je participe grâce au numérique à cet élan citoyen que j’observe. Je reste en contact avec la petite dame de 85 ans seule au bout de la rue dans son appartement, je participe aux applaudissements sur mon balcon à 20h, souligne le courage des soignants qui prennent fonction à l’hôpital du coin et salue mes voisins…

Ces mêmes voisins qui n’étaient que des visages inconnus il y a une semaine encore deviennent dans l’obscurité de mon beau quartier des voix toutes aussi inconnues, mais présentes, puis des contacts, qui me demandent de mes nouvelles, s’inquiètent du suivi de mes patients, me souhaite une bonne soirée… Et à demain surtout, à demain oui ne ratons pas ce Rendez-vous….. Il est unique, il est important, il me rappelle au combien l’être humain est un être groupal et au combien cet ère numérique accusée de nous décérébrer, nous rassemble soudainement face à l’adversité…

Mais parlons de mes patients, il est temps de rétablir quelques vérités, oui c’est mon travail, oui je gagne de l’argent à les écouter, et à les entendre, oui j’ai l’impression de parfois être qu’une petite bouée sur laquelle il viennent s’accrocher pour reprendre leur souffle. Je ne traite que ces urgences-là, mais en terme de psyche humain tout est urgent… Comme beaucoup de petits entrepreneurs, je m’apprête à traverser une période difficile et je dois continuer à payer mes charges et donc à faire payer mes consultations. Je ne voyagerais pas cet été, tant pis de toute façon, l’E3 était annulée…

Je télé-travaille comme vous, comme beaucoup pour sauver un système économique au bord de l’asphyxie, mais que l’ère numérique est en train de sauver. Mais donne aussi de mon temps aux personnes que j’ai autour de moi. Hier, un appel a été lancé pour que les psys en ligne travaillent gratuitement, je le fais déjà en tant que citoyenne au quotidien et depuis longtemps je donne déjà de mon temps dans des actes bénévoles, mais mes télé-consultations ne peuvent hélas pas être gratuites. Ces télé-consultations, sont un moyen que j’utilise comme mon confrère Jean-Paul Santoro pour continuer de prendre en charge qui en a besoin. Le Virus qui nous guette aujourd’hui est en train de poser les fondements de la médecine de demain, et nous en sommes les précurseurs.

Sujet fragile, à risque, contaminée, je suis chez moi et un médecin prend virtuellement ma température. Il attend l‘instant où je devrais aller à l’hôpital,  il monitore mon état, tout va bien, le virus est en train de fiche le camps de mon corps…. Je respire, il écoute mon souffle à travers l’écran, vérifie l’état de ma peau, évalue mon degré de fatigue… Trois  jours que j’ai de la fièvre, autant d’heures que je pense à tous ceux que j’ai côtoyé ces derniers temps, à prendre des nouvelles. Trois longues journées à répéter à mes proches par ces mêmes écrans « c’est comme un gros rhume, juste un gros rhume, pas de quoi s’en faire ». Et  pourtant si je m’en fais pour les plus faibles d’entre eux.. « Reste chez toi, mets un masque et des gants si tu dois sortir…. », un dernier conseil, et je mets mon Skype en attente.

Je me lève, reprends un café, je suis bientôt à court, j’attends les rations de survies car une nouvelle connaissance, quelqu’un de mon quartier sur messenger hier soir m’a dit qu’il m’en apporterait…. Je reprends un café donc, et mon poste en même temps dans le confinement de mon appartement, j’apprends à être seule avec le numérique, avec ces écrans que je défends et je continue à apprendre avec civisme comment prendre soin des autres….. Je ne suis pas la crétine que j’imaginais….

Prenez soin de vous,

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