Global Game Jam 2020 : nous avons suivi des équipes de jammers !

Vendredi, 17H, j’arrive avec ma Rédac Chef adorée, dans les locaux d’Isart Digital et je me demande bien pourquoi j’ai accepté d’aller m’enfermer avec 200 personnes pour un événement que je ne connais pas encore malgré ses 11 ans d’existence : la Global Game Jam ! Mais de quoi parle-t-on ?  La GGJ c’est un événement international qui, en 2019, a réuni 47 000 personnes de 113 pays avec 9 000 jeux produits et qui cette année compte 48 684  participants  répartis sur 934 sites sur 118 pays. Isart Digital est l’un des nombreux sites qui accueille cet événement, et le plus grand site français, et c’est là que j’ai décidé de passer mon week-end. Adieu soleil du sud, bonjour grisaille parisienne… Me voilà donc, au milieu de tous ces « jammers » à attendre le début de l’aventure.

 

Et c’est parti !

« Repair / Réparer » sera le thème sélectionné pour cette édition 2020, et c’est directement après sa révélation que les Jammers doivent présenter le pitch de leur future création. L’objectif étant pour chacun, de se rassembler en équipe, et trouver les profils dont ils auront besoin. GD, GA, DEV, SD… Un jargon et des acronymes qu’il m’a fallu apprendre en un temps record. Aller pour vous faire gagner du temps nous parlons là de Game Designer, Game Artist, Développeur et Sound Designer…. Ne me remerciez pas…

Participer à cette GGJ était pour moi l’opportunité de découvrir, cette fois-ci de l’intérieur, les méthodes et procédés permettant à une équipe de trouver une idée, et de réussir à la faire aboutir, le tout, en un temps record.

Mon cœur s’est laissé séduire par l’équipe dont le pitch m’a paru le plus original. Et ce fut : Glitch. L’aventure d’un petit personnage qui va tout faire pour sauver le jeu de ses développeurs, traitant bugs et autres erreurs laissées par ses derniers. Mais jusqu’où sa quête le conduira-t-il? Quels choix devra-t-il faire afin que le jeu fonctionne? Il me faudra attendre que le développement soit terminé pour le découvrir.

Mon choix fait, ni une ni deux, me voilà à la recherche de l’équipe qui a eu l’idée de ce projet.

J’ai perdu Séverine dans la foule pour finir par l’apercevoir autour d’une table où cela semble remuer pas mal du méninge, et pas dans des demis mesures… De toute évidence son équipe se constitue autour d’un projet de voitures, de garagistes qui se tapent dessus et de course à la réparation. Elle vous raconte d’ailleurs dans cet article comment elle a vécu ses premières heures de sa GGJ. Le nom de son projet : Le CarGlass Project

 

De mon côté, c’est, installés dans les locaux, que je rencontre enfin les sept protagonistes, ceux qui, aux cours des prochaines heures, donneront vie à Glitchy, le personnage du jeu. Chaleureusement accueillie par l’équipe, c’est attentive que je prends des notes au sujet des rôles qui leur seront attribués lors de cette riche et intense expérience. C’est donc depuis vendredi 19h, que j’observe Clément et Timothy au Game Design (GD), Léo et Damien au développement (DEV), Lobo et Thibaut au Game Art (GA), et Baptiste, au Sound Design (SD) Voici leur histoire.

Team Glitch
Team Glitch

Timothy m’annonce qu’il prendra, avec Clément, en plus de leurs responsabilités de GD, le rôle de Producers.

Une heure, c’est le temps qu’il faudra à l’équipe pour installer son matériel, synchroniser ses outils, et organiser son espace de travail. Une fois cette préparation indispensable terminée, il est temps de se mettre au travail.

Pour mon équipe, et aussi pour toutes les autres, c’est l’heure du « Kick Off », la réunion de pré-chantier. Un briefing d’équipe, servant à déterminer ce que sera le jeu. Même si le pitch est déjà établi, le style, l’univers, le gameplay, la direction artistique, la durée de l’expérience (directement liée à la longueur du jeu), ainsi que les technologies à utiliser, restent à déterminer.

 

Vendredi – 21h

Pas à pas, le début de l’aventure Glitch se dessine, et mon équipe tombe d’accord sur ce que sera le jeu. Du côté de l’équipe de Séverine même combat… Le Kick-off bat son plein.

Lister les tâches, les répartir à tous les membres de l’équipe afin de pouvoir rapidement débuter la production du jeu, tel est aussi l’objectif de cette réunion. Mais avant d’enfin voir Glitchy s’aventurer dans un monde tout droit sorti de leur imaginaire, mon équipe devra remplir tout un tas d’étapes.

Alors que les Game Designers imaginent et établissent les règles et le storyboard du jeu, les codeurs commencent à installer les « socles » de celui-ci. Les Games Artists  quant à eux travaillent à élaborer un MoodBoard. Lors de Game Jam, il est rare d’avoir le temps de créer un MoodBoard, mais quant on travaille en équipe, sur un jeu, pour l’instant, pas parfaitement défini, le MoodBoard aidera grandement à définir la direction artistique.

Le MoodBoard permet de respecter la charte graphique du jeu et montrer les inspirations. Elle correspond à la direction artistique du jeu.

Milieu de la nuit de vendredi à samedi.

Après une nuit de sommeil bien trop courte ( que je n’aurais vraiment pas regretté de ralonger à l’heure où j’écris ces lignes), j’apprends que mon équipe a finalement déterminé l’orientation et le style du jeu.

Glitch sera donc une expérience contemplative parsemée de petits puzzles à résoudre pour avancer.

Le cap désormais défini, l’équipe s’adapte et se dispose aux nouveaux besoins techniques. La production passe à la vitesse supérieur.

Du côté de chez Séverine, tranquillement l’équipe bien soudée semble s’offrir une petite balade de santé et se paye à deux heures du matin le luxe des premiers émois que le jouet procure. Oui CarGlass est déjà un projet jouable !  Bravo les gars ! Bravo ! Ils ont l’air contents d’eux je les quitte…

 

Samedi – journée

Les ordinateurs chauffent, et le Game Design du jeu Glitch se précise. L’équipe accuse un léger retard, dû à la difficulté du choix du style de jeu, ce qui l’oblige à redoubler d’effort. Ils ne lâchent rien. Je les observe, et essaye de me faire aussi petite, qu’ils travaillent dur. Je ne les remercierais jamais assez, chacun a réussi à prendre le temps de m’expliquer, me détailler ses travaux dès lors que je posais une question, ou m’intéressais à leurs écrans.

Bref coup d’oeil chez CarGlass, la Redac’chef a disparu. Vous l’avez vue les gars ? La réponse est étonnante elle a été réquisitionnée par les Broken Heart ! Quoi elle est encore partie se faire briser le coeur ???? Non rassurez vous ? Broken Heart c’est le nom du jeu qu’elle est en train de « Designer »…  Le synopsis est simple un coeur vient d’être brisé et son propriétaire doit travailler à le reconstruire…

J’ai raté un épisode, je la rejoins, »mais, tu fais quoi là ? »  C’est le regard plein de malice (et de sommeil..et oui, n’a plus 20 ans qui le veut..) que je la découvre en train de participer à l’élaboration de son premier jeu, et nous retrouverons d’ailleurs son nom au crédit ! C’est pas beau ça ?

17H50 – Samedi

Timothy m’apprend l’expression « faire du bout en bout ». Il m’explique que, si l’équipe veut réussir à présenter une expérience vidéo-ludique, elle doit travailler tout d’abord sur une scène de début, et une scène de fin. Si seulement le temps le leur permet, alors, il étendront l’expériences, ajoutant des choses entre ces deux bouts.

Faire du bout à bout, c’est donc faire une base du jeu qui fonctionne, puis essayer de l’étoffer s’il reste du temps en ajoutant du contenu.

L’équipe prend un moment pour me faire part de l’état actuel du jeu : un des deux systèmes de base du GamePlay  est fonctionnel. Les Développeurs et les Game Designers travaillent dessus avec ardeur, les deux doivent fonctionner rapidement pour pouvoir continuer d’avancer. Les Game Artists, de leur côté, ont aussi bien avancé, et j’ai pu découvrir les prémiers éléments de décors sous les habiles stylets de Thibaut et Lobo. Au niveau du Sound Design, le fond sonore du premier niveau est lui aussi prêt !

2h30 dans la nuit de samedi à dimanche

Ça-y-est, le premier niveau est testable, et presque terminé. Wahou, quelle émotion de traverser un niveau que l’on a vu se construire bout de code par bout de code et coup de crayon (numérique) par coup de crayon (numérique). Séverine viendra me retrouver pour me dire à quel point elle est touchée de ce qu’elle voit naitre sous ses yeux, du génie de ces mecs là, de leur énergie… je lui passe un Kleenex, « va chuiner ailleurs, ici on bosse encore » ….

Aucun signe de fatigue ne transparaît, et, hormis quelques courbatures aux cuisses et aux fesses, dues à la position assise ininterrompue depuis le début de l’aventure, mon équipe reste imperturbable. Tous sont concentrés, et plus que jamais motivés à relever ce défi.

L’équipe de Séverine rencontre apparemment des petits soucis d’intégration, on transpire du côté de CarGlass…Une sombre histoire de compilation me dira-t-elle. Elle stresse, je crois qu’elle a peur pour son équipe… Je la retrouverais faire le tour des salles à la recherche de crocodiles Haribo un peu plus tard..

Pendant que Séverine soigne son addiction au sucre et continue d’apprendre à coder… Quelle fele incroyable ! De mon coté je m’essaye au graphisme et prends fonction de Game Artist, Douée de mon dessin niveau CE1, j’en profite pour incruster notre logo à un jeu de stratégies.  Et oui c’est moi qui l’ai fait ! 

Parlons un instant de la gestion humaine de cette aventure.

Isart Digital Paris accueillait, cette année, 200 participants. Pour cette occasion, les jammers ont eu le droit à un dortoir commun, jonché de matelas gonflables. Les  étudiants bénévoles de l’école, appuyés par la bienveillance du personnel, ont pris soin de nous apporter régulièrement de quoi nous hydrater, et recharger notre dose de sucre. Pas d’inquiétude, toutes substances addictives illicites étaient prohibées. Et à part quelques lignes de Pixel, rien d’autre n’aura été ingurgités…  A croire que le jeu-vidéo n’est pas perçu de cette manière ici.

Lors de la Keynote, la réunion qui précède l’annonce du thème, la gestion individuelle de la fatigue, de la faim (…, des besoins primaires) était au cœur des discours. Les professionnels ont été unanimes, dormir est la clé de la réussite. Sans sommeil, le cerveau ne fonctionne pas à son maximum, bridant ainsi grandement notre productivité. Ici on apprend à gérer ce que tous s’accordent à appeler le « crunch » d’un dernier sprint avant le rendu d’un jeu vidéo.

Ce que j’ai vu sur cette Global Game Jam, c’est une vision de l’éthique du care. Le care, c’est prendre soin de l’autre, faire attention aux autres, c’est l’entraide, la prévenance et la responsabilité. J’ai pu assister à des scènes qui reprennent ces notions, du respect du sommeil de chacun, en passant par la gestion interne des groupes, ou plus individuellement de l’attention porté à tous.

Nous nous sommes d’ailleurs, beaucoup amusés à voir les jammers faire des siestes un peu partout.

6H – 9H : quelques heures de sommeil plus tard …

C’est (enfin) à mon tour de dormir quelques heures. Je décide de suivre les conseils énoncés avant le début de l’aventure, et je m’accorde quelques heures de repos bien mérités. Séverine me suit, mais difficile de trouver le sommeil avec toutes ces émulsions intellectuelles.

Nous retrouvons nos équipes respectives  après ces quelques heures de repos.  Elles n’ont pas cessés de travailer, bien que Benjamin de CarGlass, lui a choisi une drôle de position pour réfléchir longuement … et, nous nous préparons à vivre cette dernière journée.

L’ambiance générale est au rush de fin. Je m’éloigne des espaces de travail pour laisser tout le monde terminer les détails avant le rendu final. Ils sont sérieux tous, concentrés, affairés dans leurs tâches. Je laisse mon équipe travailler sur les derniers détails du jeu et je retrouve Séverine, ou tout du moins ce qu’il en reste,  pour préparer l’interview de Jean-Maxime Moris.

Dimanche, 14h

Et c’est avec ce moment d’échange avec Jean-Max que nous continuons notre week-end. Séverine a mené avec brio cet entretien malgré nos quelques heures de sommeil. Vous pourrez le retrouver dans cet article paru cette semaine et sur notre chaine Youtube.

Ce week-end aurait pu se terminer sur cette incroyable échange mais il nous restait  encore à vivre le moment que l’on attendait tous : les tests !

Les tests des jeux vidéo créés par nos 200 jammers.

31 jeux vidéo ont été créés lors de cette game jam et je ne sais même pas par quel jeu commencer.

 

Je me décide à aller à l’essentiel et pars  tester Glitch. Séverine par solidarité pour son équipe en fera de même et sera de toute évidence ravie du Gameplay que ses nouveaux amis ont réalisé.

Je ne saurais pas vous dire le plaisir que j’ai eu de tester le jeu que j’ai vu naître. Mon équipe a fait un travail incroyable. Avoir suivi le travail de toutes ces équipes m’a permis d’apprécier avec plus de minutie chaque détails des jeux auxquels j’ai joué.

Un petit Débriefing pour finir

S’il y a un mot que nous avons beaucoup entendu c’est celui de Débriefing. Alors nous aussi, la chef et moi, nous avons voulu débriefer. Le jeu vidéo nous en parlions beaucoup autour de nos angles de vue d’utilisateurs et aussi en tant que critique de produits finis. Dans les faits, nous nous devions de reconnaître que si nous avions pensé connaitre les métiers du jeu vidéo, nous ne connaissions rien de ce qu’était la réalité des concepteurs. Voilà chose réparée et maintenant nous entendrons les réalités d’un métier –  des métiers – passionnant et difficile.

D’un point de vue sociologique j’ai trouvé cette expérience incroyablement enrichissante, nous sommes loin, très loin de l’ambiance geek à laquelle nous nous attendions. Ici c’est sérieux, on travaille et surtout on cultive l’esprit d’équipe. Nous observerons d’ailleurs à quel point sans ce dernier les projets auront pu être mis à mal. La solidarité était de mise, il n’y a d’ailleurs pas de compétition lors de la Global Game Jam. tout le monde sort vainqueur et l’entraide est de mise.

Le jeu vidéo est un métier comme un autre : sérieux, ouvert à tous, que l’on ai des idées ou du talent ou même les deux. Pas suffisamment féminin encore à mon goût, l’environnement vidéo-ludique reste un environnement révélateur de personnalités. Le vivre ensemble 24 heures/24 dans des conditions un peu difficiles était aussi intéressant à observer, les liens se sont crées, nous nous sommes faites des connaissances qui, nous espérons, deviendront des amitiés futures.

La psy que j’ai eu du mal à décrocher de son interview avec Jean-Max, revient un peu en vrac. La pauvre n’a plus 20 ans  et j’ai de la peine pour elle.

Néanmoins elle semble heureuse. Son point de vue est intéressant à entendre. Elle reste stupéfaite de l’énergie que chacun a pu déployer dans ce cadre, de l’ambiance incroyable qui a accompagné chaque heure de labeur. Elle dira « J’ai senti une bienveillance et une empathie extraordinaire les uns pour les autres« . Il n’y a pas de profil psychologique commun à proprement parlé mais on retrouve des caractéristiques communes et des profils qui s’accordent.

Elle rajoutera : « J’ai rencontré plusieurs profils névrotiques, obsessionnels pour beaucoup dans la détermination à réussir, plus hystériques à 4 heures du matin, lors des épisodes de relâchement complet. Il est important de décompresser dans ces moments là, sans cette ambiance ça aurait été plus difficile. Les consommations de sucre m’ont interpellée, j’ai du expliquer à certains groupes du caractère addictif de la chose mais aussi du besoin de bien alimenter son cerveau dans ces instants… Le cerveau étant le plus gros consommateur de Glucose. » Elle rajoutera avoir vu du talent, et, des gens qui réfléchissaient vite et bien. Psychologiquement les gens tiennent la route mais sans la solidarité qui les unissent peut être que cela tiendrait moins.. « Quoiqu’il en soit, conclura-t-elle, nous avons vu là à l’oeuvre les gens qui feront les jeux vidéos de demain et au regard de la qualité de ce que nous avons vu se créer il y fort à parier de l’avenir rayonnant de celui-ci…. « 

Nous sommes un peu tristes de partir, nous sentons un sentiment proche de celui des colonies de vacances que l’on quitte en se disant qu’il faudra attendre l’année prochaine avant de revoir des amis que l’on aimerait garder pour la vie. C’est un peu enfantin d’accord, mais l’ambiance se prenait aussi à cela, entre grande maturité et plaisir cathartique. 

Si vous aussi vous voulez découvrir le produit de cette incroyable aventure, vous pouvez retrouver Glitch sur le site de la Global Game Jam

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2 commentaires sur “Global Game Jam 2020 : nous avons suivi des équipes de jammers !”

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